Zoom sur Tomi Ungerer
Mars 2020
De et sur Tomi Ungerer
Biographies, albums, documentaires...
Les trois brigands
Tomi Ungerer | Vidéo numérique | 2018
Il était une fois trois vilains brigands... dont la vie changea totalement le jour où ils rencontrèrent Tiffany, la petite orpheline. De trois méchants elle en fit... des bienfaiteurs de l'humanité.
Le géant de Zeralda
Tomi Ungerer | Vidéo numérique | 2019
Que faire pour qu'un ogre cesse de dévorer les enfants ? Lui préparer des repas délicieux chaque jour, bien sûr ! C'est ce que fit la petite Zeralda du haut de ses six ans...
Affiches
Ungerer, Tomi | Livre | L'École des loisirs | 1994
Album publié à l'occasion de l'exposition d'une sélection d'affiches appartenant à la collection Tomi Ungerer des Musées de la ville de Strasbourg. Dans ce livre, la plupart des affiches, réalisées entre 1956 et 1995 pour des évén...
Autour de l'exposition Rufus de Lamarche et Ovize, Frac de Caen, 2020
William Morris, 1834-1896
Fiell, Charlotte | Livre | Taschen | 1999
Présente la biographie et l'oeuvre de William Morris, personnalité marquante du XIXe siècle, pionnier du design moderne. Décorateur, artisan d'art, homme politique engagé, partisan de réformes sociales et visionnaire, il a exerc...
Le style arts and crafts
Mayer, Barbara | Livre | Flammarion | 1994
Né aux Etats-Unis à la fin du XIXe siècle, le mouvement Arts and Crafts occupe une place fondamentale dans l'histoire de la décoration intérieure, par une esthétique nouvelle, une perspective plus large de réforme sociale et un vé...
William Morris
Clutton-Brock, Arthur | Livre | Parkstone | 2007
Considéré comme l'un des acteurs majeurs de l'époque victorienne, William Morris (1834-1896) fut poète, artiste, designer, éditeur et n'hésita pas à afficher ses opinions politiques socialistes, ce qui à l'époque n'était pas forcé...
L'art et l'artisanat
Morris, William | Livre | Rivages | 2011
Pour William Morris (1834-1896), la distinction entre l'art et l'artisanat, entre la conception et l'exécution, doit être abolie : tout homme, à son échelle, peut être producteur de beauté, que ce soit dans la réalisation d'un tab...
Le parti pris des animaux
Bailly, Jean-Christophe | Livre | Bourgois | 2013
Ce recueil réunit des interventions de l'auteur, ainsi que deux textes plus anciens, faisant suite à son essai sur Le versant animal dans lequel il expliquait pourquoi la question animale était devenue centrale pour lui-même. Il c...
Édition, exposition : je n'sais pas moi j'aur...
Association le FLAC | Livre | la Passe du vent | 2007
Alexandre & Florentine Lamarche-Ovize : Inven...
Tournon, Annabela | Livre | Editions the Drawer | 2017
Catalogue complet comprenant l'essentiel des œuvres récentes du couple d'artistes dont les travaux hybrides – sculptures en céramique et en faïence, aquarelles et gouaches, dessins, collages et installations – sont répartis au sei...
Manifeste des espèces compagnes : chiens, hum...
Haraway, Donna Jeanne | Livre | Climats | 2019
Sous la forme d'un pamphlet, la philosophe des sciences analyse les relations de coévolution, de cohabitation et de partenariat qui se sont tissées entre les hommes et les chiens à travers un ensemble de pratiques, depuis les prem...
Tomi Ungerer (1931-2019)
Tomi Ungerer, illustrateur, peintre, affichiste et auteur est surtout mondialement reconnu comme étant le véritable "pape" de la littérature jeunesse dont le "règne" a duré 60 ans. Décédé en 2019, il laisse une œuvre immense derrière lui : plus de 140 livres traduits dans plus de 40 langues différentes ! Il doit surtout son talent à son esprit libre, engagé et avant-gardiste pour l'époque. Ayant conçu des albums parfois inquiétants et sombres, il est à dix mille lieues des ouvrages jeunesse édulcorés de ses confrères désireux de ne pas bousculer les enfants et de les laisser dans un imaginaire naïf. « J’avais la nausée de tous ces livres à nounours, des bonbons chouchous et des petits chéris couchés sur le papier. J’étais écoeuré et je n’avais aucune intention de me battre sur ce terrain. Je suis convaincu que les enfants n’ont pas besoin qu’on leur répète sans cesse la même histoire ».
Traitant de sujets tels que la différence, le racisme, la guerre, l'intolérance ou encore l'injustice, ce sont sans doute ses propres expériences de jeunesse qui l’ont amené à imaginer ce type d’histoires.
En effet, le jeune Tomi (de son vrai prénom Jean-Thomas) n’a pas eu une enfance facile. Né en 1931, en Alsace, à Strasbourg, Tomi est le dernier de la fratrie composée de quatre enfants. Son père décède brutalement alors qu'il n'a que 4 ans ! Passionné d’histoire et d’art, son père possédait une importante bibliothèque qui deviendra une source d’inspiration pour son fils. Fasciné par Mickey, Tintin, les Contes de Perrault et les Fables de la Fontaine illustrés par Gustave Doré, tous ces ouvrages influenceront son futur travail. Tomi, meurtri par cette disparition tragique, se réfugie dès son plus jeune âge dans le dessin ; passion qui ne le quittera jamais plus.
Mais une autre épreuve marquante va faire basculer l’enfance de Tomi et le traumatiser pendant longtemps. Lors de la Seconde Guerre Mondiale, après la défaite de la France en 1940, l’Alsace est annexée par l'Allemagne. Il n'a que 8 ans ! L’utilisation du français est déclarée illégale et Tomi apprend l’allemand en trois mois. À l’école, il subit l’endoctrinement nazi. Son prénom jugé insuffisamment germanique est changé autoritairement en « Hans ». Il s’adapte. Il devient caméléon : français sous son toit, allemand à l’école, alsacien avec ses copains. Cette période l'a traumatisé à vie : "je faisais encore des cauchemars chaque nuit en lien avec cette période". En 1945, l’Allemagne est battue et l’Alsace redevient région française. Il doit reparler français et ne plus utiliser l’allemand. Heureusement, pendant cette dure épreuve, il a pu compter sur le soutien de sa maman qui l’encourageait à rire, à faire rire, à dessiner, à écrire, à se divertir et à développer sa curiosité.
Après le bac et quelques voyages, Tomi entre à l’école des Arts décoratifs de Strasbourg. Il va y faire la connaissance d’étudiants américains et se passionne pour le jazz, le blues et la littérature américaine. Cette envie de découvrir cette nouvelle terre le pousse à quitter la France. Il embarque pour l’Amérique et arrive à New-York en 1956 avec « 60 dollars en poche et un visa de 6 mois » ! Il s’y installe. il a 25 ans ! C'est là-bas que vont être édités ses premiers albums jeunesse et qu'il va rencontrer un succès croissant. Parallèlement, Tomi Ungerer illustre des revues (Fortune, Holiday, Life...) à l'ère de la société de grande consommation et l'âge d'or de la pub ! La photo étant encore coûteuse, on fait alors appel à des illustrateurs !
Mais Tomi reste avant tout un auteur engagé et dans ce cadre, il réalise de nombreuses affiches dénonçant la ségrégation raciale, la guerre du Vietnam, la société de consommation et l’embourgeoisement de cette société entre autre. Ses productions sont parfois si virulentes qu’il rencontra des problèmes avec le FBI !
Toute l'agitation et l'effervescence ethnique, culturelle, artistique de New-York le lassent peu à peu. A l'âge de 40 ans, il plaque tout et décide de partir au Canada, en Nouvelle-Ecosse, province austère et désœuvrée. Il restaure une ferme sur une presqu’île à laquelle on ne peut accéder qu’à marée basse. Pour vivre, il travaille la terre et élève son bétail. Il vit en autarcie avec sa femme et ses deux enfants. Cinq ans plus tard, en 1976, la famille part s’installer définitivement en Irlande, où Tomi meurt à l’âge de 88 ans.
Il donna à la ville de Strasbourg toute sa collection de jouets anciens, d'affiches et de dessins (11000 dessins originaux, estampes, sculptures…) ainsi que sa bibliothèque personnelle composée de plus de 1500 ouvrages. C'est en 2007 que le Musée Tomi Ungerer ouvre ses portes à Strasbourg.
A la gloire des animaux oubliés...
Orlando, Rufus, Emile, Crictor, Adélaïde de Tomi Ungerer
« Si j’ai conçu des livres d’enfants, c’était d’une part pour amuser l’enfant que je suis et d’autre part pour choquer, pour faire sauter les tabous et mettre les normes à l’envers ». Tomi Ungerer va réhabiliter les animaux « déchus » de la littérature jeunesse et leur rendre gloire dans une série de cinq albums publiés entre 1958 et 1966 : Crictor le boa constrictor, Adélaïde le kangourou ailé, Émile la pieuvre, Rufus la chauve-souris et Orlando le vautour. « J’aime les bêtes. Parfois je les envie, me sentant un peu des leurs. Ou je les plains, sachant qu’un humain n’est guère digne de leur confiance ».
Dans la veine de la fable animalière, les héros de ces histoires sont des animaux mal-aimés et inhabituels dans le bestiaire réservé aux enfants. « J’ai pris des animaux réputés désagréables, répulsifs et je les ai rendus sympathiques ». Tomi Ungerer rend ces animaux plus humains que les humains. Ils se dévouent à la cause humaine, sauvent des vies, empêchent des actes malveillants et tissent des amitiés profondes avec les hommes. Ces livres montrent aux enfants qu’une différence n’est jamais insurmontable. À travers ces albums, Tomi Ungerer veut sensibiliser les enfants et bousculer les adultes afin de stopper les préjugés et les aprioris. L’animal est ici un vecteur de sentiment. Enchanté par ce projet, l'auteur avait même imaginé leurs héritiers : « j’aurais dû continuer avec Joséphine, la mouche tsé-tsé qui procurait du sommeil aux insomniaques ».
Un des cinq albums, Rufus, raconte les pérégrinations d'une chauve-souris qui découvre le monde diurne et par conséquent les couleurs et les humains. Cette histoire a inspiré deux artistes parisiens : Florentine et Alexandre Lamarche et Ovize qui ont conçu une exposition, spécialement pour le Frac de Caen en 2020, intitulée Rufus du nom du héros d'Ungerer. Il s'agit d'un "one-shot" puisqu'étant proposé uniquement à Caen et réalisé par les artistes sur place pour cet édifice propre en respectant les espaces et en s'adaptant aux avantages et aux inconvénients qui peuvent être intimement liés au lieu. Cet évènement avait pour but de convier le spectateur à une véritable enquête plastique à travers des oeuvres vives, colorées, tantôt kitchs et décalées, tantôt classiques et surtout porteuses d'un message fort : l'altérité homme/animal. En parcourant l'exposition, on retrouve tout un travail de références disséminé dans leurs oeuvres : univers comics, traités philosophiques, symbolique des couleurs, Art and Crafts, monde animal...
Ce travail, qu'ils mènent à deux et qu'ils créent sous une même identité depuis plus d'une dizaine d'années, amène un regard critique constant et leur permet ainsi d’"explorer des territoires où ils étaient incapables d’aller seuls". Florentine pratique la gravure, Alexandre a plutôt une culture du graff. Cette complémentarité leur a permis de développer une œuvre aussi protéiforme que narrative, entre art et arts décoratifs avec une démarche qui est tout autant artistique, esthétique, littéraire, philosophique, conceptuelle, humaniste et manuelle. Mais leur rencontre est avant tout une histoire d’amour et un art de vivre.