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Antidote
Edité par Maison Antoine Vitez - 2009
La pièce s'ouvre sur la lettre de Samantha Smith, écolière américaine âgée de 10 ans, destinée à Iouri Andropov, secrétaire-général du PCUS. Commence ensuite le monologue d'un garçon originaire de Moldavie qui va structurer toute la pièce. En retraçant son histoire, de son parcours d'écolier à son suicide, et la vie de sa famille, il va balayer peu à peu la grande Histoire. La micro histoire de la cellule familiale se noue à la grande histoire, à travers une chronologie déstructurée, qui alterne flash-back, prolepse, présent (Tchernobyl ; guerre en Transnistrie ; guerre en Géorgie ; destitution de Gorbatchev à son retour de Foros ; le pipeline Nabucco ; l'Holocauste ; l'empoisonnement du président ukrainien avec de la dioxine durant sa campagne électorale ; la prise d'otages du théâtre de la Doubrovska de Moscou). Son récit est entrecoupé par la propagande médiatique, scolaire et par des récitations : interminables énumérations des leçons apprises par coeur égrenant formules chimiques, composition des différents gaz, différents modes d'emploi concernant les mesures de sécurité en cas de contamination chimique ou les consignes d'utilisation des bouteilles de gaz. De l'enseignement qu'il a reçu à l'école, il reste marqué par les lettres pour la paix, que l'institutrice récoltait en fin de journée pour les donner à l'enseignant des travaux manuels qui les jetait au recyclage de papier, la règle qui déferlait sur ses petits doigts pour ne pas avoir fait ses leçons. L'auteure pointe l'absurdité du système scolaire, on n'y apprend ni mathématiques, histoire ou géographie, mais à se servir d'une kalachnikov en trois minutes, mettre un masque anti-gaz en un centième de seconde, fabriquer un masque artisanal, faire des exercices de défense contre les armes de destruction massive, exercices absolument aberrants comme se jeter à terre dans la direction opposée au vent, connaître par coeur les premières règles de survie, et réagir dans le calme en cas d'attaque nucléaire. Toutefois l'apprentissage de formules chimiques, de la protection anti-gaz, et des mouvements nécessaires pour la survie, ne protège ni de l'intoxication physique ni de l'intoxication idéologique. La pièce montre comment l'endoctrinement fait rage dès le plus jeune âge, la peur est omniprésente, celle d'une attaque terroriste ou celle de l'ennemi, l'ennemi c'est l'autre, tout individu provenant d'un pays non communiste, tout étranger, il est désincarné, sans identité, sans nom, sans visage, tout comme le gaz ou la radiation qui n'ont pas de goût, pas d'odeur, on ne les sent pas, on ne les voit pas.